
Mégaporcherie de Feusines, pourquoi nous ne faisons pas appel
Après de longs mois d’une bataille sur le terrain par le Collectif citoyen contre le projet de mégaporcherie de Feusines puis la longue bataille juridique que notre association a menée avec la Fédération de Pêche de l’Indre, le jugement en première instance du Tribunal administratif de Limoges rendu le 17 décembre 2024 nous a profondément déçu. Reconnaissant malgré tout le bien-fondé de plusieurs de nos arguments il a estimé qu’ils n’étaient pas de nature à remettre en cause la légalité de l’arrêté que nous contestions.
Dès lors la question nous était posée de décider de faire appel de cette décision devant la Cour d’appel administrative de Bordeaux. Après une longue réflexion, bien qu’étant convaincus de la justesse de notre combat que n’ont pu que confirmer les évènements survenus pendant la procédure et qu’elle n’a pas pris en compte, pollution de la Taissonne et mortalité brutale par asphyxie de près de 600 porcs, nous avons décidé de ne pas faire appel. En voici les raisons.
Un contexte politique très défavorable…
Nous constatons tout d’abord que le climat politique et économique actuel va à l’encontre de la protection de l’environnement. La carence de l’État pour la prise en compte des enjeux environnementaux est patente, les enjeux économiques passent clairement en premier sans se préoccuper des impacts sur la nature et la santé humaine et sans évaluer le coût final de ces projets pour la société. La protection de la nature et des populations s’efface au bénéfice de l’industrie agro-alimentaire. Malgré le fait que tous les décideurs politiques et économiques savent que les élevages industriels sont le pire modèle agricole, qu’il pollue, maltraite, tue et qu’il n’est pas durable, il bénéficie d’un traitement largement facilité et poussé par les aménagements des réglementations depuis plus de 10 ans. La mortalité de 600 porcs constatée dans cet élevage en juin 2024 confirme la nocivité de ce type d’élevage industriel. La pollution grave de la Taissonne, constatée en contre-bas de la porcherie, pour laquelle une plainte a été déposée il y a plus d’un an, est toujours en attente d’aboutissement. Dans cette affaire, le porcher a dissimulé l’écoulement d’une fosse à lisier/digestat dans le milieu naturel, pratique totalement proscrite et fautive. Après avoir tout d’abord nié, il a ensuite reconnu l’existence de drains sous la fosse pour évacuer les fuites dans le milieu naturel mais a pris le temps de faire disparaitre les preuves matérielles. La DDETSPP, poussée par notre obstination, en a finalement administré la preuve. Pour autant, rien ne garantit que la procédure de pollution n’aboutisse.
… entrainant une accentuation de la judiciarisation des atteintes à l’environnement …
La judiciarisation de la lutte pour la protection de la nature et de l’environnement s’accentue et aggrave les conditions de notre action en sa faveur. Nous avons actuellement, situation totalement inédite ( !), 4 autres procédures judiciaires en cours. Trois devant le tribunal administratif de première instance de Limoges et une devant la Cour d’appel administrative de Bordeaux suite à un appel du Ministère de l’Environnement à la demande du préfet de l’Indre pour contester un jugement en notre faveur contre le déterrage du blaireau.
Dans le cas de la procédure concernant la porcherie de Feusines dont les arguments font appel à des éléments très techniques, la décision défavorable du tribunal administratif de Limoges nous contraignait à demander, à nos frais, deux études complémentaires sur les questions du forage et de l’absence de plan d’épandage de secours, pour argumenter notre appel, nécessitant des dépenses financières supplémentaires.
… exigeant des moyens financiers que nous n’avons pas.
Ces procédures et études complémentaires ont un coût important. Dans le cas de cette procédure, poursuivre devant la Cour d’appel de Bordeaux nécessite a minima 7000 € sans compter le coût des études complémentaires qui nous apparaissent nécessaires. Nous ne bénéficions pas, comme le promoteur de ce projet de mégaporcherie de l’appui financier et juridique d’une puissante coopérative agro-industrielle. Nos moyens ne sont que ceux que nos adhérents et simples citoyens nous accordent.
Nous tenons à remercier tous les donateurs et donatrices qui ont permis en 2022 de porter ce recours devant le TA de Limoges. Malheureusement nous n’avons pas aujourd’hui les moyens financiers de faire face à toutes les procédures.
Cet ensemble de constats fait que nous n’allons pas en cour d’appel malgré notre opposition ferme à ce type d’installations industrielles qui ne produisent que des effets négatifs pour la nature, la biodiversité, la qualité des eaux et des sols et au final coûtent cher à la collectivité pour réparer ses effets négatifs et délétères.
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