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Le photovoltaïque au sol

Publié le 29 janvier 2025

De toutes les énergies renouvelables, le photovoltaïque est celle qui a le plus fort développement dans l’Indre. Elle est perçue par certains acteurs (communes, agriculteurs), comme une opportunité de ressources financières supplémentaires et bénéficie d’une image plutôt positive. Les projets se multiplient, surtout au sol, ce qui n’est pas sans poser des problèmes au regard de la préservation des milieux naturels. Dans ce numéro de Mosaïque, nous rappelons notre positionnement sur cette énergie renouvelable (ENR) et la règlementation actuelle. Et nous dressons un état des lieux des projets dans le département et des impacts potentiels des parcs photovoltaïques sur la biodiversité. Dans le prochain numéro de Mosaïque, nous traiterons la mise en œuvre de la loi Accélération de la production d’énergie renouvelable (Aper) et de situations posant de réels problèmes pour la biodiversité. 

Oui au photovoltaïque, mais avec discernement.

Indre Nature défend la transition énergétique qui repose sur deux piliers : la sobriété énergétique et la fin progressive des énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole) et fissile (uranium) par le recours aux ENR. Pour autant, il ne suffit pas de produire une énergie renouvelable pour qu’elle soit vertueuse. Il n’y a pas de production d’énergie qui n’ait aucun impact sur l’environnement et sur la biodiversité. L’énergie « verte » est un concept marketing abusif. Afin que le développement des ENR soit le plus vertueux possible, il est donc impératif de prendre en compte les autres enjeux environnementaux dont la biodiversité. Cela doit s’accompagner d’un dialogue renforcé entre les associations, les collectivités locales, les citoyens et les industriels.

Le bilan carbone du photovoltaïque est, selon l’Agence de l’environnement et de la maitrise de l’énergie, de 25,2g CO2 /kWh, à comparer au bilan carbone du gaz qui est de 400g CO2/kWh. Cette énergie est donc poussée par les politiques publiques. Un des effets est, sans conteste, l’accélération de l’installation des champs de panneaux photovoltaïques dans notre département qui est massive.

La production individuelle sur toiture continue à bon train, la production au sol à grand train et la production en agrivoltaïsme va se développer. Et les toitures agricoles sont de plus en plus souvent équipées. Les autres gisements de production - panneaux sur des toitures industrielles et commerciales, sur les aires de stationnement, sur les bâtiments collectifs - avancent doucement alors que le potentiel est énorme. Le choix des opérateurs industriels est clairement de privilégier les installations de grande puissance au sol au détriment des autres gisements considérés comme moins rentables. Cela nous touche donc directement puisque les zones à fort potentiel de biodiversité comme les friches ou les prairies considérées comme à faible intérêt agronomique sont des cibles de choix. Notre vigilance doit donc être grande et cela nécessite de nous y retrouver dans les réglementations qui s’appliquent.

Une réglementation incitative

Plusieurs textes de loi ou règlementaires concernent la production énergétique photovoltaïque. Les lois Energie-Climat de 2019 et Climat et résilience de 2021, sensées traduire les propositions de la convention citoyenne pour le climat, ont été suivies de la loi Accélération de la production d’énergie renouvelable (Aper) du 10 mars 2023. Son objectif est de simplifier et de stimuler la production des ENR en France. Elle autorise l’installation de panneaux solaires sur des terrains déjà artificialisés ou sans enjeu environnemental majeur, tels que les bords de routes, autoroutes, voies ferrées et fluviales, les friches littorales. Elle impose également la mise en place d’ombrières photovoltaïques sur les parkings de plus de 1 500 m², avec une obligation de couvrir au moins la moitié de la surface de l’aire de stationnement.

Concernant le photovoltaïque au sol, la loi Aper a prévu qu’à l’avenir seules pourront se développer les installations agrivoltaïques. Mais des exceptions sont toutefois prévues en ce qui concerne des sols réputés incultes ou non exploités depuis 2013. Ces surfaces doivent être identifiées dans un document cadre. Il est actuellement en cours de validation dans l’Indre sur la base d’un travail confié à la chambre d’agriculture.

En 2024, un décret d’application puis un arrêté ministériel précisent le cadre spécifique pour le développement de l’agrivoltaïsme, qui combine agriculture et installation de panneaux photovoltaïques sur les terrains agricoles. Légalement, l’agrivoltaïsme est défini comme l’ensemble des installations solaires qui contribuent au maintien ou au développement d’une activité agricole. Ces installations doivent assurer une production agricole significative et un revenu durable. D’autre part, la loi Aper a confié aux communes le soin de définir, par type d’énergie renouvelable, les zones dans lesquelles elles souhaitent voir se développer les projets, les zones d’accélération des énergies renouvelables (Zaer). Nous y reviendrons dans le prochain numéro.

La loi Aper a également prévu la mise en place d’un observatoire des énergies renouvelables et de la biodiversité, il doit permettre le développement de connaissances objectivées sur les impacts positifs et négatifs des ENR.

Une explosion de projets photovoltaïques au sol 

Le dernier bilan consolidé du développement du photovoltaïque au sol dans l’Indre a été fourni par la Direction départementale des territoires (DDT) à la commission administrative chargée de donner un avis sur ces projets, la CDPENAF, en février 2024. 

À date du 1ᵉʳ janvier 2024 le bilan était le suivant :

Tableau photovoltaique

* Sur les 22 projets en instruction au 1ᵉʳ janvier 2024, 17 ont été examinés en CDPENAF en 2024 et validés à 2 exceptions près. La dissémination partout sur le territoire de l’Indre de ces projets est bien visible sur la carte n°1

La dissémination partout sur le territoire de l’Indre de ces projets est bien visible sur la carte n°1.

Carte photovoltaique

Carte : état et localisation des projets photovoltaïques au sol dans l’Indre au 01/01/2024.

Et cette situation est antérieure à l’application des mesures d’accélération prévues dans la loi Aper qui ont commencé à être mises en œuvre courant 2024. Vu cette situation, les objectifs à 2050 fixés dans le cadre du Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sradett) seront atteints dans notre département bien avant 2030 !

Ce développement massif du photovoltaïque peut être vu comme une bonne nouvelle pour le climat puisqu’il s’agit d’une énergie en grande partie décarbonée (hors production des panneaux). Celui-ci pose malgré tout potentiellement des problèmes selon le lieu d’implantation de ces parcs. En dehors des terrains artificialisés, comme des friches industrielles, et hors production agrivoltaïque réelle et pas de pur alibi, les parcs photovoltaïques au sol sont susceptibles de s’implanter sur des terres agricoles qui pour l’occasion auront été estimées à faible potentiel ou sur des milieux naturels qualifiés aussi pour l’occasion de friches. Ce sont, dans ces deux situations, soit des terres agricoles retirées de leur mission de production alimentaire, soit des milieux naturels souvent derniers refuges de la biodiversité ordinaire ou remarquable ce qui contribue à la poursuite de la diminution des habitats naturels.

Jacques Lucbert et Dominique Viard

 

Des impacts sur la biodiversité

L’essor de l’implantation des parcs photovoltaïques (PV) est susceptible de provoquer d’importants impacts sur le patrimoine naturel. Notamment lorsqu’ils font l’objet d’installation sur des espaces naturels et habitats riches en biodiversité. Toutes les phases, depuis la production ailleurs dans le monde puis l’implantation et le raccordement d’un PV, sont susceptibles d’engendrer des dégradations sur la biodiversité.

L’implantation d’un parc photovoltaïque dans l’Indre commence par une phase de débroussaillage, de compactage, de dévitalisation, d’installation des panneaux et de clôture qui bouleverse profondément les paysages et les habitats, détruisant l’essentiel de la biodiversité qui y demeure.

D’autres impacts plus spécifiques existent. L’ombrage des panneaux limite par exemple la croissance des plantes et donc réduit d’un facteur 4 la biomasse végétale sous les panneaux. L’ombrage défavorise les espèces héliophiles et donc les fabacées, réduisant la ressource nectarifère pour l’entomofaune. Les insectes aquatiques prennent fréquemment, par polarisation de la lumière, les panneaux pour des surfaces en eau sur lesquelles ils viennent pondre. Les impacts sur le sol et sa mésofaune ne sont pas à négliger, car ils altèrent les fonctionnalités essentielles du sol (stockage du carbone, de l’eau, etc.). Les études montrent une baisse de 6 à 10 fois de la fréquentation des PV par les chiroptères par rapport à des habitats périphériques. Les exemples d’impacts sont nombreux.

La phase de raccordement des parcs au réseau électrique peut avoir aussi des effets non négligeables. Bien que le câblage longe régulièrement les voies de circulation existantes, il peut détruire des habitats ou des espèces protégées. L’implantation de lignes à très haute tension (THT) peut enfin aussi causer des dommages à l’avifaune en générant électrocutions et collisions (rapaces, grues, cigognes…). 

Quentin Giraud

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